« Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’Espérance ». L’Espérance ne déçoit pas!
Le 9 Mai, jour de l’Ascension, le Pape François a publié ce qu’on appelle une « bulle d’indiction », document officiel de la Curie romaine, rédigé en latin, portant le sceau du Pape et publié l’année précédant une année jubilaire. Cette année, dite Année Sainte arrive tous les 25 ans, et la toute première fut instituée en 1300 par le Pape Boniface VIII. François, qui signe :« Évêque de Rome, le serviteur des serviteurs de Dieu » a tenu à mettre 2025 sous le signe de l’Espérance et souhaite que « puisse l’espérance remplir le cœur de ceux qui liront cette lettre. »
Dans toute vie, il y a l’espoir et l’espérance, tous les deux issus du même verbe espérer. Si l’espoir a une connotation humaine, s’il est la confiance dans la vie et ses évènements, l’espérance, elle, est une force bien plus profonde qui nous dépasse et imbibe notre vie sans qu’il soit question d’un évènement particulier.
Charles Péguy (1873-1914) nous la décrit de façon originale :
« Ce qui m’étonne, dit Dieu, c’est l’Espérance. Et je n’en reviens pas. L’Espérance est une toute petite fille de rien du tout… L’Espérance voit ce qui n’est pas encore et qui sera. Elle aime ce qui n’est pas encore et qui sera…Et au milieu de ses deux grandes sœurs (la foi et la charité) elle a l’air de se laisser traîner. Comme une enfant qui n’aurait pas la force de marcher. Et qu’on traînerait sur cette route malgré elle. Et en réalité c’est elle qui fait marcher les deux autres. Et qui les traîne, et qui fait marcher le monde. »
- Amour et patience, un chemin de grâce
Dans la Lettre aux Romains, l’apôtre Paul stimule le courage de la communauté chrétienne de Rome. L’espérance est également le message central de ce prochain Jubilé. Et le Pape souhaite « que cette année soit pour tous un moment de rencontre vivante et personnelle avec le Seigneur Jésus, “porte” du salut ( Jn 10, 7.9). Il est « notre espérance » ( 1 Tm 1, 1), Lui que l’Église a pour mission d’annoncer toujours, partout et à tous.»
Dans un premier temps, François nous dit combien la communauté chrétienne a besoin, aujourd’hui comme aux premiers temps, d’être fortifiée, ranimée afin que l’Évangile puisse être porté partout à tous les hommes. Il nous parle d’une espérance « inébranlable, fondée sur l’amour, qui ne cède pas devant les difficultés ». Le corollaire de l’espérance, c’est la patience. Or, de nos jours, nous ne savons plus attendre, il nous faut tout et tout de suite. Redécouvrir la patience, c’est en même temps, retrouver l’émerveillement devant les petites choses. Savoir s’émerveiller, et savoir aussi dire merci.
« La patience, qui est aussi le fruit de l’Esprit Saint, maintient vivante l’espérance et la consolide en tant que vertu et style de vie. Apprenons donc à souvent demander la grâce de la patience qui est fille de l’espérance et en même temps la soutient »
En cette année 2025, « se mettre en marche sera la caractéristique de celui qui va à la recherche du sens de la vie » Redécouvrir le silence, l’effort, l’essentiel dans des itinéraires de foi « en s’approchant du sacrement de la réconciliation, point de départ irremplaçable d’un véritable chemin de conversion ». Le Pape rappelle qu’en 2033, seront célébrés les 2 000 ans de la Rédemption (Passion, Mort et Résurrection du Seigneur). Le Jubilé de 2025 se terminera dans la Basilique St Pierre du Vatican le 6 Janvier 2026, jour de l’Épiphanie.
- Signes d’espérance
Il nous faut apprendre l’espérance dans les signes des temps que Dieu nous envoie. Et c’est l’Église qui les scrute et les interprète « à la lumière de l’Évangile » pour pouvoir ensuite répondre aux questionnements éternels des hommes, tant sur leur vie présente que future. « Il faut donc prêter attention à tout le bien qui est présent dans le monde pour ne pas tomber dans la tentation de se considérer dépassé par le mal et par la violence. Mais les signes des temps, qui renferment l’aspiration du cœur humain, ayant besoin de la présence salvifique de Dieu, demandent à être transformés en signes d’espérance. »
- Premier signe d’espérance: la paix pour le monde plongé, une fois encore, dans la tragédie de la guerre.
- Deuxième signe : une vision pleine d’enthousiasme de la vie à transmettre. Maternité et paternité responsables sont inscrits dans nos corps et dans nos cœurs : c’est la mission confiée par Dieu à l’amour des époux.
- Puis : le retour de la joie de vivre qui remplace l’instinct de survie, triste et individualiste.
Nous devons être nous-mêmes signes d’espérance auprès de ceux qui connaissent la détresse : les détenus, les malades, les personnes handicapées, les jeunes, les migrants, les personnes âgées… « et les milliards de pauvres qui souffrent de l’exclusion et de l’indifférence » TOUS ont besoin de proximité et d’affection.
3 – Appels à l’espérance
« La faim est une plaie scandaleuse dans le corps de notre humanité et elle invite chacun à un sursaut de conscience … Comme l’enseigne l’Écriture sainte, la terre appartient à Dieu et nous y vivons tous comme des hôtes et des étrangers. Si nous voulons vraiment préparer la voie à la paix dans le monde, engageons-nous à remédier aux causes profondes des injustices, apurons les dettes injustes et insolvables et rassasions les affamés ».
En 2025, il y aura 1700 ans qu’eut lieu le premier Concile de Nicée (Iznik en Turquie) qui avait pour mission de préserver l’unité de l’Église et au cours duquel fut rédigé le Symbole de la foi toujours en usage aujourd’hui. Cet anniversaire invite toutes les églises et communautés à poursuivre le chemin vers une unité visible.
4 – Ancrés dans l’espérance
Foi, espérance et charité sont inséparables : débordons d’espérance pour rendre enthousiastes notre foi et notre charité. L’espérance d’une vie éternelle avec Dieu nous fait vivre dans cette attente qui termine l’Apocalypse : Viens, Seigneur Jésus ! le Maranatha des premiers chrétiens. Quatre verbes sont le cœur de notre foi : Le Christ est mort, il a été mis au tombeau, il est ressuscité, il est apparu. La vie nouvelle reçue par le Baptême nous ouvre à la dimension de l’éternité et à la vie qui ne finit pas. C’est le témoignage des martyrs – nombreux à notre époque – qui féconde notre espérance, et ce témoignage devra être célébré au cours du Jubilé.
Après la mort, cette plénitude de communion avec Dieu nous offrira le bonheur. « Quel bonheur attendons-nous et désirons-nous ? Non pas une joie passagère, une satisfaction éphémère qui, une fois atteinte, demande toujours plus dans une spirale de convoitises où l’âme humaine n’est jamais rassasiée mais toujours plus vide. Nous avons besoin d’un bonheur qui s’accomplisse définitivement dans ce qui nous épanouit, c’est-à-dire dans l’amour, afin que nous puissions dire, dès maintenant : Je suis aimé, donc j’existe ; et j’existerai toujours dans l’Amour qui ne déçoit pas et dont rien ni personne ne pourra me séparer. »
Cependant, il faut se préparer au jugement de Dieu. Un jugement qui est amour et qui se fondera sur la manière dont nous aurons ou non pratiqué cet amour. Là se trouve le mystère insondable de la miséricorde divine. C’est ainsi que « l’indulgence jubilaire, en vertu de la prière, est destinée de manière spéciale à ceux qui nous ont précédés, afin qu’ils obtiennent la pleine miséricorde ».
Le Sacrement de Réconciliation est la meilleure façon de connaître Dieu en se laissant réconcilier par Lui, « en savourant son pardon…redécouvrons la beauté du sacrement de la guérison et de la joie, la beauté du pardon des péchés ! » Et le Pape nous offre ensuite quelques lignes merveilleusement humaines sur le pardon :
« Une telle expérience de pardon ne peut qu’ouvrir le cœur et l’esprit à pardonner. Pardonner ne change pas le passé et ne peut modifier ce qui s’est déjà passé. Mais le pardon permet de changer l’avenir et de vivre différemment, sans rancune, sans ressentiment et sans vengeance. L’avenir éclairé par le pardon permet de lire le passé avec des yeux différents, plus sereins, même s’ils sont encore embués de larmes. »
5 – Marie, Mère de l’espérance
« En elle, nous voyons que l’espérance n’est pas un optimisme vain, mais un don de la grâce dans le réalisme de la vie ». Invoquée comme Stella Maris (Étoile de la Mer), elle nous soutient et nous aide à toujours arriver au port quel que soit le temps. En cette année jubilaire, les sanctuaires mariaux seront des espaces privilégiés pour nous aider à espérer.
« L’image de l’ancre évoque bien la stabilité et la sécurité que nous possédons au milieu des eaux agitées de la vie si nous nous en remettons au Seigneur Jésus. Les tempêtes ne pourront jamais l’emporter parce que nous sommes ancrés dans l’espérance de la grâce qui est capable de nous faire vivre dans le Christ en triomphant du péché, de la peur et de la mort. »
Laissons à François la conclusion :
« Laissons-nous dès aujourd’hui attirer par l’espérance et faisons en sorte qu’elle devienne contagieuse à travers nous, pour ceux qui la désirent. Puisse notre vie leur dire : « Espère le Seigneur, sois fort et prends courage ; espère le Seigneur » (Ps 27, 14). Puisse la force de l’espérance remplir notre présent, dans l’attente confiante du retour du Seigneur Jésus-Christ, à qui reviennent la louange et la gloire, maintenant et pour les siècles à venir. »
Cette Espérance « qui fait marcher le monde », et dont la diaconie essaie de se faire témoin.
Des « sentinelles de l’Espérance », c’est ainsi que Gilles Rebêche qualifie tous ceux et celles qui « espèrent dans l’Église, dans les personnes, dans les situations ». Depuis le 31 Mai 1982, jour de la Visitation, où a été instituée la Diaconie, des hommes et des femmes font de la Parole de Dieu le vivant quotidien de leur action au service de « tout ce qu’il y a de faible dans le monde ». Mais combien de portes a- t-il fallu ouvrir pour que ce projet devienne réalité : portes des préjugés, portes du fatalisme, portes de l’inertie et portes de l’exclusion ?!
Fraternité, écoute, compassion, solidarité, présence, partage sont à l’œuvre dans les cinq actions pastorales du service diocésain de la Diaconie : Pastorale du deuil, pastorale des personnes détenues et de leurs familles, pastorale de la solidarité, pastorale des migrants et pastorale de la santé. L’Église rejoint ainsi chacun au cœur de ses souffrances, quelles qu’elles soient.
St François d’Assise écrivait dans ses Admonitions : « Heureux l’homme qui, dans les limites de sa propre faiblesse, soutient son prochain autant qu’il voudrait être soutenu par lui dans un cas analogue »
Ce qui s’accomplit depuis 42 ans dans la diaconie diocésaine, « c’est le réalisme d’une espérance qui refuse la fatalité de la misère et de l’exclusion », comme l’écrivait Gilles Rebêche. Ne faut-il pas être pétri d’espérance pour devenir, selon ses propres termes, un « acrobate de Dieu » : « Acrobates de Dieu pour porter les projets les plus fous en misant sur les plus fragiles ; acrobates de Dieu pour nous inscrire dans la dynamique du provisoire comme dans une vitesse de croisière ; acrobates de Dieu pour assumer la plus entière des solitudes tout en vivant sur scène liés à tant d’autres vies humaines. »
Comme au jour de la Pentecôte, entendons, chacun dans notre langue, le message de l’Évangile ; dans la simplicité de notre quotidien, soyons d’inlassables messagers d’espérance, car l’espérance est amour. Et soyons sûrs d’une chose : à l’entrée du Paradis, on ne nous demandera pas de montrer patte blanche, mais d’arriver les mains vides.
Aline RACHEBOEUF
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