Un éco centre spirituel pour répondre à la « clameur de la terre, clameur des pauvres » ?

Au cours de la session « Renaître d’En Haut avec Ceux d’En Bas » qui s’est tenue les 2 et 3 février à la faculté Loyola à Paris, Xavier De Bénazé de l’éco-centre spirituel du Chatelard a fait porter son intervention sur la crise économique et sociale. Clameur de la terre, clameur des pauvres : c’est le grand apport de Laudato Si. Le pape François est le premier chef d’état à l’argumenter ainsi. L’écologie intégrale est une écologie qui écoute ces deux clameurs et comprend que c’est une même crise.

Question posée à l’éco-centre spirituel du Châtelard en 2022-2023 :
Est-ce qu’il y a une raison de faire du centre spirituel du Châtelard (jésuite) un éco-centre spirituel, c’est-à-dire, est-ce qu’on peut mettre cette institution, au service des chrétiens et chrétiennes, qui aujourd’hui cherchent le prochain pas à inventer avec Dieu, dans le contexte de cette ère géologique dans laquelle nous rentrons, où l’homme est devenu la force de vie géologique, celle qui change le plus vite la face de la terre ?
Je disposais pour cela d’une année de recherche.
Est apparu une évidence pour beaucoup dont on peut se réjouir : si c’est un lieu d’écologie intégrale, il y aura donc une place pour les plus pauvres.
Mais passer à la mise en pratique est nettement plus difficile.
En tout cas, aujourd’hui ce n’est pas au cœur du métier de l’éco-centre spirituel du Châtelard: « on ne sait pas faire ».
D’où l’intérêt d’aller voir les gens qui savent faire.
Mais très vite est apparu un problème de cadence. « Vous allez trop vite pour mettre les plus pauvres dans cette réflexion, pour leur parole soit à la source du projet. »

Comment faire un éco-centre spirituel avec les plus pauvres ?

Deux tours de consultations auprès de plusieurs d’entre vous qui avez l’habitude d’écouter les personnes plus pauvres ont montré que c’était une bonne idée mais que vous n’aviez pas le temps car déjà pris par de nombreux autres projets…

A partir de la publication « Reconstruire ensemble le monde abîmé » par ATD Quart Monde, la pratique semble plus compliquée, « j’ai dû perdre une capacité d’écoute, je n’ai pas trouvé de clé magique « : on est tous pareil, on a des résistances, on ne sait pas trop où on va.

Je me suis donc heurté à une double difficulté dans cette recherche: le temps qui manque et un public pas facile à mobiliser dans un temps court.

Finalement qu’est-ce que j’écoute ?
Des jeunes étudiants qui se font voler leur avenir, ce qui peut arriver aussi aux plus pauvres.
La terre, le silence de cette forêt du Châtelard qui se meurt de sécheresse, cette terre classée dans la catégorie des plus pauvres par le pape François.

Alors, qu’apprendre de tout ça ?

Écouter et construire une parole à partir des plus pauvres au niveau politique et social, apprendre des petits trucs pour vivre avec pas grand-chose mais correctement.  Mais les pauvres vivent une pauvreté subie et non pas choisie. Il y a un risque de chanter une sobriété choisie en masquant la pauvreté subie.

Nos sociétés ne se préparent pas à ce qui va venir, à une décroissance ou post croissance. Elles font l’autruche. Elles vont subir des effondrements non choisis. Alors là, j’ai vu des personnes sous contraintes non choisies gardant leur dignité, leur capacité à faire la fête et à trouver malgré tout que la vie est belle.

En conclusion, je pense qu’il faut faire travailler les personnes qui ont connue la précarité sur cette question : « Comment on garde sa dignité quand on se trouve sous contrainte non choisie ? » C’est là qu’il y a quelque chose à entendre, une leçon de vie à apprendre pour pouvoir avancer ensemble !