De la manche sur le parvis de l’église à la sacristie

Après le décès de sa maman, Marius connait une descente dans les méandres de la basse ville de Toulon. 12 ans de manche, de squat, de peur, d’alcool, de honte. Puis un jour, c’est une main invisible qui le retient de commettre l’irréparable et une main tendue d’un sacristain qui le remet en route.
Marius a 50 ans quand il témoigne et il est sacristain de l’église st Louis à Toulon.

Il est né à Toulon et a travaillé dans le bâtiment. Il a ensuite vécu deux épreuves en 1978 avec la perte de son père et en 1982 avec la perte de sa mère. S’en est suivi un licenciement et « une descente dans les méandres ». Fortement touché par le décès de sa maman, il n’a plus le moral et se trouve peu soutenu par ses frères et sœurs. Il s’est retrouvé à la rue, vivant dans des squats. Puis il a retrouvé un travail et une chambre. Mais il « est reparti en barigoule comme on dit ». Il a quitté Ollioules pour Toulon où il n’était pas connu et il a continué à vivre quelques années en squat. Ne sachant pas comment faire la manche, il a vu des gars devant l’église Saint qui lui ont proposé de rester avec eux : « tu verras comment c’est ».

Un jour il s’est dit : « ça va pas aller, c’est pas gentil de ta part de faire la manche. » Il est parti à la gare de la Seyne sur mer et envisage de se jeter sous un train, malgré la peur. « Il y avait une fameuse main invisible qui m’a retenu ». C’est à ce moment qu’il a fait la connaissance du sacristain de l’église saint Louis qui lui propose de l’aider à balayer la cour, de rendre des petits services comme faire des courses. Il lui donnait en échange un peu d’argent. Quelques temps après, il lui a proposé de l’aider à préparer la messe, puis la kermesse et aussi l’installation de la crèche. Et c’est ainsi qu’il est devenu sacristain à la demande de deux prêtres, ce qui le touche. Il a commencé sans contrat et puis il en a signé un le jour de son anniversaire.

Marius a connu 12 ans de rue. Il a trouvé les hivers difficiles et il craignait la violence de certaines personnes. Il a trouvé très difficile de supporter le regard des gens : « j’avais souvent des hontes comme j’étais. J’avais très honte ». Il a aussi connu l’alcool mais « Je ne le montrais pas devant les autres. Je me le faisais tout seul, dans mon squat ».
Mais il a toujours gardé en lui une force intérieure, une « force de vouloir repartir ».

Il est devenu le sacristain de l’église devant laquelle il a longtemps fait la manche ou « la priante », l’église du quartier où il a vécu en squat. Ce changement, il le vit bien et il est bien accueilli par les voisins « qui sont heureux car il a bien tourné ». Marius précise « La vie a bien tourné pour une fois ».

Ensuite Marius a eu l’occasion d’aller à Lourdes dans le cadre d’un voyage de l’Espérance animé par la Fraternité Saint Laurent. A l’époque Marius ne souhaite pas y aller car trop cher, trop long en bus et trop peu de gens connus…mais il est attiré par « cette fameuse Grotte ». On lui propose un paiement en plusieurs fois, il se rend compte qu’il connait un peu quelques participants. Lors du trajet aller en bus, ce ne fut pas facile de parler aux autres mais nettement plus au retour ! Il retient de ce voyage l’accueil « à bras ouverts » qu’il a reçu et surtout la Grotte : « J’en ai entendu parler. Je l’ai vue devant mes yeux. Ça m’a fait plaisir. ». Quand il part à Lourdes, Marius hésite car son frère est bien malade. Il part là-bas pour confier cette maladie. A son retour son frère va beaucoup mieux.

Marius se déclare heureux désormais. Le passé, « c’est du passé ». « Je travaille pour l’église et pour Dieu quand même. Ça y est je revis. ». Il conclut en disant : « La vie c’est du bonheur. Mais je ne voudrais pas que les gens aient des trucs que j’ai eu dernièrement. »

Son message à ceux qui galèrent : « Je voudrais leur dire de se serrer les coudes, d’essayer de remonter leur moral et qu’ils essaient de vivre leur vie mieux que maintenant comme ils sont. »

Extrait du livre Paroles de vie pour tous – Témoignage de 2002